-- Par: Pierre '' Goly'' Jobin
golyblues@hotmail.com
Jay Sewall’s All Blues
Invité Spécial, Mr Ken Whiteley

Un spectacle tout en finesse et en belle énergie!

Pour paraphraser Peter Shonk, musicien invité au deuxième harmonica pour l’interprétation de la pièce-titre, All Blues, du tout récent cinquième CD de Jay Sewall, je dirais qu’en plus de quinze ans c’est le meilleur spectacle de Jay Sewall que j’ai vu… « à date!... » 

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Jay a débuté le spectacle seul. Dès son entrée en scène, il a fait signe aux gens de frapper dans les mains, et, ceux-ci ne se sont pas fait prier pour entrer dans la fête!... Son harmonica vivace et impétueux a fait le reste dans une pièce d’ouverture très réchauffante, intitulée Concerto For Harp in F Major. 

Il a poursuivi, côté sentimental, avec le « number one hit » de Doris Day, en 1945, repris de nombreuses fois, depuis, à toutes les sauces musicales, Sentimental Journey. Cette sélection fait partie de « All Blues », son tout dernier disque, un instrumental, dédié tout spécialement à son instrument de prédilection, l’harmonica! Cet album, qu’il faut prendre le temps d’écouter et de déguster, a été enregistré en compagnie de Ken Whiteley, ce musicien multi-instrumentiste dont on dirait que la musique lui sort par tous les pores de la peau, tellement il est musicien, corps et âme, comme une seconde nature!... Il est aussi un réalisateur très renommé, de Toronto. 

Le band de Jay, déjà bonifié par la présence de Daniel Marcoux, à la contrebasse et  de celle des valeurs sûres, Paul « Clean Head » Hinton, aux guitares et Barry Nameth, à la batterie, se retrouvait en bonne compagnie, accompagnant deux musiciens d’exception, Jay et Ken en « parfaite complicité », en synergie cool!!  Paradoxalement, comme en toute autre chose, le langage de la musique est fait de milliers de détours qui finissent par devenir des raccourcis d’expérience! En tout cas, ça avait le feeling d’une communication instantanée et sentie!
 

Nous étions gâtés, nous les spectateurs du Petit-Champlain d’avoir droit à ce spectacle, unique, jusqu’ici, avec Jay, Ken et le band de Jay, pour qui c’était une première. Pour le moment, le band ne les suit pas sur la route. Espérons que ça viendra pour les amateurs de bonne musique interprétée avec originalité, talent et fraîcheur!

Mediteranean Blue, qui suivait, est une très belle pièce et mélodie, composition de Jay. En entendant le souffle inspiré de Jay et la steel guitar atmosphérique de Whiteley, on aurait cru la mer à nos pieds avec ses vagues s’étendant comme des tapis sonores. Faut dire, tout de suite, que la combinaison, fort heureuse de Jay et de Ken amène tout le band à un autre niveau… 

Le St-James Infirmary dans une version instrumentale et traditionnelle avait les rythmes contrastés et les couleurs bigarrées de ce melting-pot, de ce gumbo culturel qu’est la Nouvelle-Orléans!...

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Bon, faut que je vous dise, aussi, qu’il y avait quelque chose de spécial!... De la magie dans l’air!!... Des solos, tantôt énergiques, inspirants, tantôt subtils et sentis!!... Le public était comme un sixième joueur, marquant fréquemment le rythme avec les mains, toujours disponible, et, manifestant spontanément des déferlements joyeux et sonores!... La salle était environ au deux tiers pleine, et la qualité ambiante comblait les attentes mutuelles, à en voir les mines réjouies!

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Ken Whiteley - Jay Sewall
Sur Amazing Grace, apparemment en version originale irlandaise ou écossaise, accompagné de Ken, toujours très présent, Jay a vraiment joué dans l’exécution finement ciselée! La concentration, la précision et la subtilité de l’interprétation étaient vraiment au rendez-vous. Wow! Y’a des fois où on se demande si l’on a rêvé ou si c’est vraiment possible!… Un vieil habitué de la scène blues et des bluesmen me disait qu’il ne s’était jamais aperçu, malgré qu’il l’ait vu en spectacle auparavant, à quel point Jay Sewall était bon! Il m’enlevait les mots de la bouche, rejoignant mon sentiment que l’on vivait, en cette soirée, un moment exceptionnel, un moment de rencontre des talents, étonnant!

Le premier set s’est terminé sur la pièce All Blues de Miles Davis, interprété en duo d’harmonica et band, en compagnie de l’harmoniciste invité, Peter Shonk qui a su livrer la marchandise avec goût et à propos!... Jay et lui se sont échangé accompagnements et solos, dans une interprétation de deux grands de l’harmonica, à Québec!

Au retour de la pause, nous avons eu droit à un When The Saints Go Marchin’ In avec Ken, simultanément, au jug sous l’aisselle et mandoline en bandoulière. Paul Hinton frottait sa planche à laver avec entrain, et chaque musicien y est allé, tour à tour, de son solo. Faut dire que Jay s’est toujours fait une marque de commerce et un point d’honneur, d’assurer un côté mise en scène à ses spectacles!

Sur la composition Blue Tears, dédiée au magicien de l’harmonica blues, Little Walter, Ken y est allé d’un jeu de guitare engageant et plein de soul, composant ainsi avec l’harmonica chromatique de Jay Sewall, aux teintes mélancoliques, qu’affectionnait, aussi à ses heures, ce pionnier du Chicago Blues.

Celtic Swing, cette pièce casse-cou, durant laquelle Jay doit utiliser dix harmonicas différents et s’exécuter dans douze tonalités, a connu quelques accrochages et hésitations, ici et là, sans grand dommage, cependant… De plus, l’expérimenté Ken Whiteley a récupéré la situation, après l’exécution, en soulignant tout bonnement, qu’en musique, il y a des pièces de niveau de difficulté dix, et que Jay venait de nous en faire une de niveau de difficulté douze sur dix! C’est ce que l’on appelle faire ressortir le positif d’une situation et mettre le focus vers l’avant!... Un p’tit tour de magie, en un tournemain, du grand art d’un musicien d’expérience!

Indian City, cette pièce aux sonorités bizarres et orientales, flirtant avec le psychédélisme, nous a révélé, encore une fois, le coté storyteller de Jay. Cet aspect significatif à l’intérieur de sa discographie, gagne à être fréquenté. Cette toune dépaysante a levé, voire plané, encore une fois!... Ce qui me surprend à chaque fois!...

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Une touche originale de gospel avec The Gospel Truth, un mélange de reel québécois, de blues américain et de joueur de cuiller ontarien avec Blue Reel, à l’harmonica solo!... Vraiment, ce spectacle, grandement inspiré du tout récent CD instrumental de Jay, représente tout un tour d’horizon, un tour de force, un aboutissement d’un long cheminement!... 

Ajoutez à cela une interprétation hyper réaliste et planante du classique de 1959, Sleepwalk, avec steel guitar qui porte au sentimental et harmonica aux inflexions fines et variées!... Brassez le tout avec un Jay’s Boogie Woogie endiablé et saupoudrez un rappel avec l’intemporel, l’indémodable Summertime!...

Que demander de plus? Peut-être souhaiter que ce spectacle roule et roule, encore et encore, dans l’intégralité de ses musiciens, car, en plus d’un riche panorama culturel, artistique et musical, il démontre « live » que Jay Sewall est un harmoniciste de feeling et d’entrain, et, peut-être encore plus… de finesse!!...

If you don’t have a hole in your soul, Jay Sewall’s Band, additionné de Ken Whiteley est sûrement un spectacle qui pourrait vous réjouir!!...

À la prochaine!

Par Pierre « Goly » Jobin aka Golyblues
 
 

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