Webzine Le Net Blues
-- Stéphan Lunati
steflun@videotron.ca
 
 Mes Francos à moi
22e Francofolies de Montréal, 10 au 18 juin 2010

 
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VIDÉO - Plume Latraverse
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Mes Francos ont débuté le 2ème soir où le célébrissime PLUME LATRAVERSE, monument de la musique québécoise, donnait son spectacle ALL DRESSED 2010, célébrant ainsi les 30 ans de ses Mauvais Compagnons en revisitant tout son ancien matériel à la plus grande joie de tous. Visiblement là pour fêter en grande, dans un Métropolis bondé, l’artiste gouailleur s’est montré en superbe forme, comme, d’ailleurs, ses trois nouveaux Mauvais Compagnons (basse, batterie et claviers). Le seul encore présent de l’ancien groupe, Jean-Claude Marsan, assurait les solos de guitare de façon magistrale, avec un jeu au doigté précis et un entrain à faire pâlir bien des plus jeunes.

Dès le début du show, armé de sa Stratocaster, PLUME va nous servir plusieurs de ses anciennes chansons qui tiennent encore et toujours diablement la route, étant donnée la qualité des textes comme de la musique. D’entrée de jeu, un long pot-pourri des titres de l’album ALL DRESSED (1978, réédité en 1995) tels les J’AIME PAS ÇA TRAVAILLER, NOUS AUTRES ON S’EN FOUT, VIE D’ANGE, MAUVAISE HERBE, FUCKÉ-FUCKÉ, GASPOÉSIE, MOGNON DONC et autres, enflammant la salle sur des rythmes rock, blues, folk et country… Une panoplie musicale soutenue par des textes brillants, à mourir de rire et toujours d’actualité.

Enchaînant également à tour de bras sur une lancée effrénée avec LA BALLADE DES CAISSES DE 24 (1981), ASSIS ENT’2 CHAISES (1979), L’ENCHEVÊTRÉ (1987), MA PORTE DE SHED (1975), LA JOURNÉE DU CHÈQUE (1998), et EL NINO (1998), le feu est pris parmi les spectateurs, tous acquis au Rock’n’roll du grand flanc mou, avant de nous achever avec une version incendiaire de BOBÉPINE (1975).

Dans un généreux rappel, le chanteur nous offre MOUTONOIR (1980), LES AVALEURS D’ASPHLATE (1983), et LES MAUVAIS COMPAGNONS (1982), puis termine le tout avec JONQUIÈRE (1975) et RIDEAU (1975), digne d’anthologie. Un grand artiste qui, un soir de plus, nous aura laissé un souvenir impérissable plein de bonheur…
4 jours plus tard, le temps de se remettre de la tornade PLUME, c’est KENT, l’ex-chanteur du groupe culte français Starshooter dans les années 78-81, qui, tout droit de Lyon, venait nous présenter son récent album PANORAMA (2009) en version semi acoustique, accompagné seulement de Fred Pallem (Le sacre du tympan) à la guitare électrique. Cet artiste polyvalent (vidéos, B.D. chansons, textes, livres…) nous a replongé dans ses meilleures chansons avec une émotion et une présence bien à lui.

Sa plume acérée a pondu des merveilles de paroles finement ciselées pleines de sens et de poésie et sa musique est digne des meilleurs de la chanson française. Il a d’ailleurs écrit de nombreuses mélodies pour d’autres artistes tels les Johnny Halliday, Michel Fugain, Enzo Enzo, a travaillé avec Laurent Voulzy, Mathieu Chédid et chante même sur son album avec Arthur H, Suzanne Vega, Agnès Jaoui et Dominique A. Des titres comme UN PEU DE PRÉVERT, TOUS LES MÔMES, UNE VILLE À AIMER’ PANORAMA, CASH (émouvant hommage à Johnny Cash) ou RESTE ENCORE sont de véritables perles irisées.

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Kent

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VIDÉO - Jacques Higelin
Il nous avait préalablement avisé, durant sa conférence de presse, qu’à 69 ans il n’était pas du tout ramolli, qu’il avait de l’énergie à revendre et que son show allait être encore plus rock que jamais. Soutenu par un groupe entièrement renouvelé sauf pour son fabuleux percussionniste de toujours et fidèle compagnon Dominique Mahut, JACQUES HIGELIN, d’entrée de jeu, remercie d’abord les spectateurs pour leur  chaleureux accueil, puis, s’installant au piano, leur lance en pleine face LE MINIMUM (1976), avant d’enchaîner directement avec son nouveau COUP DE FOUDRE (2010) merveilleusement sentimental.

J’AI JAMAIS SU (2010) lui a été inspiré en essayant d’apprendre le mambo. Le public ravi était aux anges et le chanteur porté sur une douce folie avant de présenter NEW ORLEANS (2010), dans laquelle Pamela  Norton, créole imaginaire, reine des marching bands qui lui rappelle sa découverte du jazz et du blues des années folles. Or il s’avère qu’il existe une vraie Pamela Norton plutôt spécialisée en microbiologie. Je vous laisse imaginer la délirante improvisation qui s’ensuivit.

Ensuite, ce fut MONA LISA KLAXON (1974), dans une explosion sonore, version longue avec King Kong, qui souleva la salle. Tout le monde était heureux et le show prenait sa vitesse de croisière. HIGELIN nous ramène alors à la dure réalité de la vie: la mort. Son KYRIE ELEISON (2010) nous explique qu’il faut aimer et jouir de la vie au maximum car le plaisir ne repassera pas, le tout soutenu par un riff et un son rappelant Tom Waits.

QU’EST-CE QUI SE PASSE À LA CAISSE ? (2010), un des meilleurs titres de son nouvel opus, avec un gros son funky raconte la folie des gros centres d’achats. Un titre parfait pour la scène, entraînant à souhait et servi avec un texte surréaliste. HIGELIN sent bien alors qu’il s’agit d’une soirée magique. Aussi revisite-t-il son PARIS-NEW YORK, N.Y.-PARIS (1974) dans une version rock des plus énergiques, les sons stridulants de la guitare déchirant la salle, tandis que les percussions et la batterie martelaient la scène à tout rompre. Pour ce qui est de la poésie, CIGARETTE (1974) et CHAMPAGNE (1979) font l’affaire de façon éclatante et évidente. Même ÉGÉRIES, MUSES ET MODÈLES (2010), est une pure merveille dans la même lignée que les anciens titres, prouvant que le talent et l’inspiration sont toujours présents après tant d’années.

Puis, le sommet du spectacle. AOÛT PUT (2010), son jazz funky et psychédélique qui aborde la furie des grands départs en vacances et dans laquelle il fait chanter le public. Moment fort. VALSE MF (2010), d’abord prévue comme duo avec Marianne Faithfull, confirme son côté un peu anar et révolté. BYE BYE BYE (2010) termine son tour de chant avant de gratifier les fans, en rappel d’UN AVIATEUR DANS UN ASCENSEUR 1978), magnifique chanson d’amour et d’espoir, seul au piano, déclamant qu’il n’est pas de plus grand malheur que de laisser mourir le rire dans nos cœurs…

Le public, debout, subjugué par tant de grâce, en redemandait encore, sachant très bien HIGELIN capable de donner des concerts fleuves de 3 à 4 heures, soirée qui restera, néanmoins gravée à tout jamais dans nos mémoires comme la plus belle preuve d’amour à un public québécois qui le lui rend bien.    
 

Stéphan Lunati
 

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