Webzine Le Net Blues
Par: Marc Champagne
Charles Mack
Bassiste

Charles Mack est connu à titre de bassiste de James Cotton, mais il est bien autre chose aussi comme cette entrevue vous permettra de le découvrir. Celle-ci se veut un condensé des réponses originales qui m'on été transmises en anglais. Cette entrevue vous donnera toutefois l'opportunité de découvrir ce personnage fascinant qu'est Charles Mack.

Photo: Erwin Loewen
Dans ta biographie il est fait mention du fait que tu as tout d’abord joué du tuba. Dans quelles circonstances en es-tu venu à te tourner vers la guitare basse ?
Quand j'étais enfant, je n'avais vraiment aucune idée de quel type d'instrument choisir et lorsque le moment de le faire arriva, comme j'étais plutôt timide de nature j'avais remarqué que le tuba était un gros instrument et que celui-ci me permettait en quelque sorte de me cacher derrière lui. Ce fût donc mon choix du moment. Par la suite, lorsque le département de musique de mon école décida de monter une formation de Jazz, j'ai commencé à m'intéresser sérieusement à la guitare basse. En ayant appris la technique je m'étais aussi apperçu que la demande et les débouchées étaient plus grands à titre de bassiste qu'à celui de joueur de tuba quoi que j'aimais beaucoup cet instrument. C'est ainsi que je devint bassiste, abandonnant graduellement mon rêve de devenir un jour premier tuba pour l'orchestre symphonique de Chicago.

En tant que bassiste, quelles ont été tes principales influences ?
Une de mes principales influences est Charles Mingus, et comme j'écoute énormément de musique Jazz,  Blues, Soul, Funk et R&B mes influences sont multiples mais je pourrais tout de même vous citer les Jaco Pastorius, Verdine White, Larry Graham, Abraham Laboriel, Bootsy, Rufus Reid, Ron Carter, Marcus Miller, Anthony Jackson et sans doute de nombreux autres dont les noms ne me reviennent pas à la mémoire en ce moment même.

Tu es un fervent utilisateur de la guitare basse à six cordes. Peux-tu nous parler un peu des avantages que présente l’usage de ce type particulier d’instrument et des circonstances qui t’ont amené à son utilisation ?
Ma toute première basse était une Fender Precision (un modèle à quatre cordes) par la suite j'ai utilisé des instruments à cinq cordes parce que je trouvais qu'ils offraient plus de possibilités  en donnant davantage de profondeur aux pièces exécutées. À cette époque je jouais pour l'orchestre de la marine américaine dont le répertoire était très varié comme vous pouvez l'imaginer.

Donc un soir où je me trouvais à Seattle je me rendis dans un club où j'allais de temps en temps et j'y ai rencontré un bassiste extraordinaire du nom de  Mr. Darryl Silvers. C'était un type très cool et comme cette soirée en était une de type jam session, celui-ci m'invita à monter sur scène. Comme je n'avais pas apporté ma basse avec moi je lui demande alors si je peux utiliser la sienne. C'était une basse à six cordes et je n'avais jamais joué de ce type d'instrument auparavant. Mon ami accepta de me prêter la sienne non sans avoir hésité un peu parce qu'il en prenait un soin jaloux. C'est avec beaucoup de respect pour son instrument et en lui assurant que j'en prendrais grand soin que je finit par le convaincre. Donc comme ce soir-là je me sentais un peu triste et seul à cause d'une fille....enfin toujours est-il que lorsque je me mis à jouer de cette basse il se passa quelque chose de vraiment bizarre. À commencer par la touche de cet instrument qui était incroyable et aussi du fait qu'en jouant je me mis à en ressentir à travers mon corps toute l'énergie et la chaleur transmises par cette basse et aussi à voir littéralement les couleurs musicales qu'elle pouvait produire.
Une expérience que je qualifierais de spirituelle en quelque sorte et qui n'a rien à voir avec les effets d'une quelquonque drogue tu comprends ? C'était pour moi un véritable choc et immédiatement après la pièce j'ai demandé à Mr. Silvers si il voulait me vendre cette guitare basse. Coup de chance incroyable pour moi, celui-ci accepta car il en possédait déjà plusieurs de ce type et avait aussi un peu besoin d'argent. J'ai mis plusieurs mois à la payer mais ça n'avait pas d'importance. Cette basse incroyable que j'ai nommé “Mammie” m'appartenait enfin. Pour ce qui est des avantages de la six cordes, disons qu'elle permet de “sonner” comme une guitare au niveau des aigues et aussi de donner des notes plus basses. Bref, ça donne un éventail musical plus grand en te permettant aussi de jouer des notes hautes tout en t'accompagnant avec les cordes basses. Personnellement j'utilise un modèle  Yamaha TRB 6P qui est équipé de pick ups piezo qui me permettent d'avoir un son très acoustique ( j'adore ça ). J'aime beaucoup peindre musicalement en allant sous le E mineur et en combinant avec les C et B mineurs et l'avantage avec les six cordes est justement de te permettre un plus grand éventail à la fois au dessus et en dessous.

Tu abordes différents types musicaux, parmi ceux-ci, est-ce que tu as des préférences particulières ?
J'aime la musique sous toutes ses formes et à vrai dire il me serait difficile d'avoir une préférence particulière même si j'adore particulièrement le Blues. Je ne pourrais toutefois pas ne jouer que ça pour le reste de ma vie. Cela provient sans doute de mon passé musical qui a fait en sorte que j'ai touché différents styles du Classique au Jazz en passant par de nombreux autres. Pour moi ce qui importe c'est de pouvoir groover sur n'importe quel type musical et d'explorer tout ceux je n'ai encore jamais touchés.

Dans l’histoire du Blues il est assez courant d’entendre des histoires à propos de jeunes artistes qui ont été aidés et en quelque sorte parrainés par des vétérans. Est-ce que dans ton cas il t’est arrivé quelque chose de similaire et si oui quels ont été ces artistes?
À ce niveau, je crois bien avoir été béni par la vie. À commencer par mes parents qui malgré le fait qu'ils craignaient un peu le milieu m'ont toujours supporté.

Photo: Erwin Loewen
www.charlesmack.com
Quand je dis qu'ils avaient un peu peur c'est surtout à cause de l'aspect financier du métier et non pas qu'ils détestaient les musiciens. Disons qu'ils auraient préféré que je devienne avocat ou docteur parce que pour eux cela aurait présenté une plus grande sécurité. . Mon père, Mr. L.C. Mack et ma tante Georgia Johnson m'ont beaucoup inspiré et je me souviens que mon père me parlait souvent de ce Blues qu'il jouait à la guitare en me disant que cette musique était comme sa vie. Vivre dans le sud, travailler dur et essayer de survivre. Une fois il m'a laissé prendre cette guitare et m'expliqua comment jouer ce blues avec douceur, lentement en laissant la place aux feelings. Quand à ma tante Georgia, elle en jouait aussi de cette guitare avec une bouteille de bière sur les cordes pour lui donner des sons plaintifs que je n'avais jamais entendus avant. Ce furent mes premiers parrains musicaux si je peux dire et par la suite quand j'ai joué au Japon c'est  Darek Jackson qui jouait avec Al Jareau et Kenny Loggins qui m'a beaucoup appris. Il m'a enseigné notamment l'écoute de la musique et je dois beaucoup à ce musicien extraordinaire. Par la suite, il y aura les  Mr. Lefty Dizz,  Charlie Love,  Lucky Peterson avec lequel j'ai eu la chance de rencontrer mon héros en la personne de Marcus Miller. Finalement ce sera la rencontre de James Cotton avec lequel je travaille régulièrement. Quelques mots à son sujet, c'est un homme extraordinaire qui me traite comme un fils et que je considère et considèrerai toujours comme un véritable père. Alors comme tu peux voir, il y a plusieurs artistes qui m'ont aidé et je remercie Dieu de les avoir mis sur ma route.
Photo: Erwin Loewen
MP3 - Movin
Dans le monde du Blues, nous retrouvons de plus en plus les influences d’autres styles musicaux, quelle est ton opinion à ce sujet ?
Bien, dans toutes les formes de musique on retrouve différentes influences. Pour ma part la musique classique a toujours influencé les autres formes musicales. Tu te souviens sans doute de cette période où on retrouvait des pièces classiques mélangées avec du Disco, c'est un exemple parmis d'autres. Tout comme le Blues français donne un mélange différent de ce qui se fait aux États Unis. Et si tu vas au Texas, tu retrouveras un style tout à fait différent du reste du pays. Prends mon exemple, j'ai tout d'abord joué et écouté de la musique classique puis des musiques de fanfares et de marches militaires. Par la suite ce fût le Jazz et finalement le Blues qui sera suivi de choses aussi diverses que le Country, la Polka, le Rock, le Soul, le R&B, le Latin et le Gospel. En fait, chaque type musical que tu touches a une influence sur ta manière de jouer et de sentir la musique. Les influences sont normales et on retrouve dans ma musique une formule regroupant toutes ces influences.

Que penses-tu de la situation actuelle du Blues au niveau de la popularité et de sa propagation ?

Actuellement j'aime bien la popularité dont le Blues jouit ici aux États Unis. Et je remarque que le public est constitué de gens de tous les âges. L'année 2004 ayant été nommée « The Year of the Blues » cela a eu pour effet de ramener la population vers le Blues. Bien sûr, il y a des villes où on enretrouve davantage comme Chicago par rapport à des villes comme celles de Caroline du nord par exemple. Il y aurait bien des choses à dire sur la question, comme par exemple le degré de participation ethnique, le support de l'industrie, celui du gouvernement etc. Je pourrais bien écrire un livre là-dessus je crois...

Tu as présentement un album en préparation et il s’agira de ton premier album solo.
Peux-tu nous parler un peu de son contenu ? Cet album portera le titre de “Next Generation Blues” et il devrait sortir en avril 2005. Il sera composé d'un mélange musical allant du Blues au Soul en passant par le Funk avec un soupçon de Folk. Il contiendra des pièces originales dont voici quelques exemples :
“Katie’s Alone” Cette pièce parle de ma mère et de mon père. De leur vie et de leur transition lors de leur déménagement de la Caroline du sud vers Chicago.
“Just Wanna”  qui donne une saveur différente du Blues avec un soupçon de R&B et de Soul le tout accompagné d'un solo de basse à la Charles Mack.
“Rollin Down”  Une pièce avec des accents du sud et du dobro, ce qui lui donne un niveau différent.
“Tradition” Du Blues traditionnel avec un son de basse très acoustique et un invité surprise pour la partie harmonica de la pièce.

Je suis très excité par rapport à cet album et je prie pour qu'il connaisse du succès. Je suis conscient que son contenu risque de brasser un peu l'industrie du Blues et j'espère qu'il sera bien accepté.

Quelle est la date prévue pour sa sortie et où aura lieu le lancement officiel ? En principe ce lancement devrait avoir lieu au début d'avril 2005. Vous trouverez les informations exactes sur mon site : www.charlesmack.com

Pour le bénéfice de nos amateurs de Blues, pourrais tu nous dire de quelle manière il nous sera possible de se procurer ton album ? Nous étudions diverses formes de distribution mais pour débuter nous allons utiliser la distribution en ligne par le biais du site http://www.charlesmack.com  et nous avons mis sur pied notre propre étiquette “ Mark 9 Records “. Ajoutons aussi que nous avons eu les participations des Maurice John Vaughn au chant et à la guitare, Mark Mack, le batteur de James Cotton et membre du Ko Ko Taylor’s band, Brian James du Lonnie Brooks band, Rob Blaine qui fait partie de la formation de Little Milton, Nigel Mack(enzie), Roosevelt Purifoy du Carlos Johnson band, Doug Tramble du Charlie Love band et Ariyo du Billy Branch band . De plus, j'ai réussi à obtenir Mr. Darek Jackson bassiste pour Al Jareau et Kenny Loggins  qui joue sur une des pièces (Just Wanna) et qui a agi à titre de producteur pour une partie de l'album.

Quels sont tes autres projets pour l’année qui débute ? Pour l'instant ils consistent à terminer le cd et à en faire la promotion. Par la suite sans doute d'organiser une tournée. Mais tout ça se fera tranquillement «  Nice and easy pace wins the race right?”

Je me te remercie beaucoup pour nous avoir accordé cette intéressante entrevue. J’espère aussi que nous aurons la chance de recevoir ta visite prochainement au Québec. Merci à toi Marc, j'ai vraiment beaucoup apprécié cette entrevue qui est la toute première avant la sortie de l'album et merci aussi pour les questions pertinentes, pour votre support et votre amour du Blues.

Entrevue réalisée et traduite par Marc Champagne pour Le Net Blues.
 
 




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