Webzine Le Net Blues
George
Buddy Guy
-
Le 2 juillet prochain, Buddy Guy et Susan Tedeschi
seront au Métropolis dans le cadre du 30e Festival International
de Jazz de Montréal. Hâtez-vous, les billets sont présentement
en vente, tous les détails au www.montrealjazzfest.com
Né en 1936, ce bluesman Louisianais est
considéré comme une légende vivante du Chicago Blues.
Ä 13 ans, George Buddy Guy fabrique sa propre guitare avec des objets
recyclés provenant de la maison familiale. À cette époque
il n’avait pas d’argent pour en acheter une, il débuta donc sa carrière
dans la pauvreté mais, un jour les choses on changé et il
a fait la rencontre de son père spirituel, Muddy Water. Puis tout
se bouscula et sa réputation traversa toutes les frontières.
Il a côtoyé alors les Junior Wells, Slim Harpo, Sonny Boys
Williamson II, Howlin’ Wolf, Willie Dixon, Big Mama Thornton, BB King,
le jeune Johnny Lang, Carlos Santana, Rod Stuart et même Éric
Clapton qui qualifie Buddy Guy de meilleur guitariste blues de la planète.
J’aimerais à l’occasion de sa visite à Montréal, vous
proposer une revue en ses propres mots où il raconte son histoire
abondante de confidences, de sincérité et d’aventures. |
--
Vidéo
- Mary Had a Little Lamb
Bon en mode pleine écran
|
Buddy Guy
Je ne suis pas du genre à jouer assis sans bouger comme BB King
ou Eric Clapton. Je viens d’une famille de religion baptiste et dans
les églises baptistes, quand on se sent bien ce n’est pas seulement
les doigts qui bougent mais tout le corps, je ne peux rester sans bouger.
Je pense que c’est ce que vous voyez sur la scène lorsque j’y suis.
-- |
Lettsworth – Louisiana
J’habitais la Louisiane, je ne savais pas que la vie était dure
et c’était vraiment dure. On avait un cheval, une mule et
un cochon. Je disais dernièrement à quelqu’un que,
j’avais à marcher pour aller à l’école et pour ne
pas user mes chaussures je les enlevais et avant de rentrer j’ôtais
la boue de mes pieds et je remettais mes souliers. Quand on y repense
en vieillissant on se rend compte que c’était dur.
On avait pas d’auto, mon premier véhicule a été
un petit poney et j’ai penser, on avait à marcher loin, aller retour
pour aller à l’école et on devait aller à l’épicerie.
Si la marche était bonne pour nous, mes parents seraient encore
vivants. |
Nous avions que 2 jours de congés, Noël
et Pâques les autres jours étaient normaux. Pas de 4
juillet ni d’action de grâce car, lorsqu’on travaille sur une ferme
on doit travailler avec la température. Alors si le 4 juillet
était une belle journée mais froide, tu avais une journée
de congé parce que le coton n’était pas prêt à
la récole, on devait le laisser mûrir ce qui nous donnait
un p’tit break.
En Louisiane, il faisait tellement chaud en juin,
on avait des maisons en bois avec des fenêtres en bois et des portes
en bois alors quand ma mère avait un 5 ou 10 sous elle disait, on
va s’acheter un bout de moustiquaire pour avoir un peu d’air frais et garder
les moustiques dehors car, en Louisiane les moustiques sont si gros qu’ils
peuvent vous sortir de la maison. On devait être habitué car
lorsqu’ils nous piquaient on ne s’en préoccupait plus on les laissait
nous piquer… j’avais l’habitude de couper des morceaux de moustiquaire
et ma mère disait: pourtant j’ai des moustiquaires et les
moustiques réussissent quand même à passer. Et
elle regardait et voyait que les moustiquaires étaient en lambeaux
parce que j’avais coupé des morceaux pour essayer de faire, avec
une boîte de conserve et plein de bidule, une guitare.
J’avais 15 ou 16 ans quand nous avons eu l’électricité,
nous n’avions qu’un ''socket'' et pour s’acheter un phonographe nous avons
cueilli assez de coton, ce n’était que des 78 tours à ce
moment là, je crois que mon premier long jeu fut Boogie Chillen
de John Lee Hooker, ça été la première chose
que j’ai appris à jouer. |
--
|
-
-
Big Mama Thorton - Buddy Guy
|
Ce qui m’a amené à la guitare électrique
fut Lightnin' Slim. Un après-midi, je me suis arrêté
à l’avant de l’épicerie, la seule que nous avions, et je
l’ai vu connecter sa guitare à un amplificateur et à commencer
à jouer Boogie Skill et je croyais que c’était une blague,
je regardais les câbles de l’amplificateur à la guitare et
les cordes de la guitare, je suis rester là et j’ai parler avec
lui et j’ai appris à la connaître très bien avant qu’il
ne décède. Ça été la première
guitare électrique que j’ai vue.
J’ai gradué et suis allé à
l’école secondaire, j’avais déjà acheté le
premier livre de Muddy Waters 78 et je l'ai appris. Je voulais prendre
des cours de musique, j’ai rencontré le prof de musique et il m’a
dit, nous allons commencer avec le livre 1 et je lui ai dit que je savais
déjà le livre 1 et il m’a dit alors : je ne peux t’enseigner.
Je lui ai dit que non, tu ne peux m’enseigner. |
-
Guitar Slim est venue au Masonic Temple de Baton
Rouge avec cet extraordinaire album avec les arrangement et le back-up
band de nul autre que Ray Charles. Je suis resté là
à regarder le band sans Guitar Slim, pendant au moins une heure
et demie. Je ne sais pas mais, je crois que plusieurs faisait ça,
comme BB King, Guitar Walker et Guitar Slim car le bar vendait du whisky
jusqu’à ce que le présentateur dise : Ladies and Gentlemen,
Guitar Slim ou BB King alors les gens arrêtaient de boire et se disaient,
je dois regarder le spectacle… Alors ce soir c'était pareil, ils
vendaient leur whisky et attendaient le plus longtemps possible et lorsqu’ils
ont dit: Ladies & Gentlemen Guitar Slim, j’ai entendu la guitare mais
je ne le voyais pas sur le stage, je me suis alors demandé, mais
qu’est-ce qui se passe…et puis un gars apparut avec Guitar Slim sur ses
épaules qui jouait, c’est alors que je me suis dit, si un jour j’apprend
à jouer de la guitare je veux sonner comme BB King mais je veux
être théâtrale comme Guitar Slim. |
Stevie Ray Vaughan - Buddy
Guy
|
-
-
Muddy Water - Buddy Guy-
|
Car il était wild, il n’était pas
un joueur ordinaire, sa guitare avait l’air d’avoir été battue
et je me disais, c’est ce que tu appelles jouer de la guitare… il ne la
chouchoutait pas et je fais de même pour les miennes aujourd’hui.
Elles sont faites pour être jouées. On m'a déjà
demandé: Comment est-ce que tu brises autant de cordes, si tu ne
brises pas de cordes c’est que tu ne joues pas.
Un jour Guitar Slim portait un complet rouge des
souliers blancs avec ses cheveux blancs, il se promenait dans les rues
et il y avait des critiques car lorsqu’un homme portait des couleurs fortes
il était critiqué, je ne savais pas qu’il avait fait un commentaire
à ce sujet avant de mourir. Je l’ai trouvé dans un
magazine à Paris, il mentionnait que : les gens rient de moi maintenant
mais lorsque je serai mort et enterré alors ils ne riront plus car
les hommes porteront tous des couleurs voyantes. Et on l'a vu dans
les années 60, les cheveux, on commence à se colorer, rouge,
jaune, rose…
Il s’est dit beaucoup de chose à propos
de sa vie entre autre le nombre de femmes qu’il a eu. Il a un jour
dit que la vie est courte, pendant que vous vivez votre vie moi, j’en vie
3. Guitar Slim |
-
Je travaillais à l’époque à
une station d’essence et un de mes amis, qui est malheureusement décédé
aujourd'hui, est allé rencontrer et parler de moi à Big Papa
et celui-ci est venu me voir à la station. Mon patron m’a
dit : plug ta guitare et joue fort, ça va peut-être attirer
les clients, j’ai alors commencé à jouer Boogie Chill at
night, c’est alors que Big Papa m’a demandé combien je gagnais,
je lui ai dit que je gagnais environ 12 ou 13 dollars par semaine.
Je peux t’en donner autant… Alors j’ai commencé à jouer dans
des juke joint pour 15 dollars par semaine c’était l’époque
où Little Walter débutait, c’était comme de la nouvelle
musique, nous étions très populaire comme le hip-hop aujourd’hui.
Partout où nous jouions il y avait des pistes de danse et tout le
monde dansait. Je voulais aller à Chicago, pas pour faire
de la musique, mais pour voir jouer Muddy Water, Howlin’ Wolf et Little
Walter.
Je travaillais pour environ 29$ pour deux semaines
quand quelqu’un m’a dit que là bas je pourrais travailler le jour
et jouer le soir dans les clubs de Chicago. Mais ma mère a eu une
paralysie (stroke) et je ne voulais pas la quitter mais je voulais aussi
y aller pour travailler et pour voir les Little Walter et Muddy Waters
et jouer les soirs. |
--
|
-
-- |
J’ai fini par y aller et j’ai voulu rencontrer
Phil Chess alors je lui ai écrit une note, je ne sais pas si il
l’a eu mais les gens à qui j’ai remis la note ont vu ma guitare
qui était une Gibson LesPaul et à ce moment ils enregistraient
une session avec Wayne Bennett (the Spaniels) alors ils ont pris ma guitare
et moi je suis resté là à les regarder !
Je suis parti, j’ai bummé un peu et je me suis retrouvé sans
le sous pendant 3 jours. Finalement, un étranger m’a vu dans la
rue pendant que jouait de la guitare et m’a amené chez lui, a dit
à sa femme je viens de trouver un jeune noir qui sait vraiment jouer
le blues et nous allons l’amener au 708 Club. C’est là qu’Otis
Rush jouait, c’était un club ou 99.9% des gens étaient noirs,
sauf celui qui m'y avait amené. J’ai joué ce soir là
en deuxième partie. Muddy Water qui habitait tout près,
est venu durant la soirée, je lui ai dit que j’était affamé
il m’a alors amené dans sa Chevrolet rouge station wagon 1958 et
m’a donné un sandwich au salami, je lui ai dit Man, c’est comme
un T-bone. |
-
-- |
Tout le monde l’appelait Mud et lui de me dire
qu’il était Muddy Water je lui ai alors dit : si vous êtes
Muddy Water alors je n’ai plus faim.. Seulement de le voir me remplissait.
Muddy Water a été comme un père pour moi jusqu’à
sa mort. C’est Magic Sam qui m’a amené au Cobra Record,
ça avait l’air d’un garage. Magic Sam m’a alors dit chante,
j’ai alors interprété une vieille chanson de BB King et on
m’a toute suite sorti un contrat pour que je le signe. . J’étais
plutôt du style Hendrix et lorsque j’étais en studio avec
Muddy Water ou Magic Sam, Howlin’ Wolf, je voulais jouer à ma manière
mais eux n’était pas près à ce genre là et
je les respectais, j’étais honoré de jouer avec eux. |
-
Quand on m’appelait pour jouer avec Muddy ou
Little Water j’étais au 7e ciel. J’ai été déçu
de voir que Muddy Water ne faisait pas le tour du monde mais le tour des
clubs, toujours les mêmes et qu’il n’était pas très
bien payé, j’ai encore des contrats de Howlin’ Wolfe et je n’arrivais
pas à croire qu’ils pouvaient vivre avec si peu, je voyais tout
ça mais je n’avais pas le cœur d’abandonner le blues. On jouait
pour la porte, on commençait en un petit groupe on se faisait 25$
ensuite il s’ajoutait des gens à notre spectacle on se faisait 12$
et on remplissait la voiture et on finissait pas ne se faire que 6$.
Un moment donné on était plusieurs et nous n’avions plu que
40 cent en poche, on a alors organiser un coup, on a dit au joueur de keyboard,
qui ne savait ni lire ni écrire, que lorsque nous arrêterions
dans une station d’essence nous irions acheter de la liqueur et des biscuits
et que pendant que nous passerions à la caisse lui devait piquer
des boîtes de conserve de viande mais, il ne savait pas lire alors
il s’est trompé d’aller et s’est retrouvé dans celle pour
le manger de chat et de chien… Alpo etc.. On avait faim,,, entre
deux biscuits,,, c’était dur à avaler quand même.. |
--
BB King - Buddy King
Grammy Award
|
-- |
Je me souviens de l’American Blues Festival,
c’est là que j’ai connu plusieurs bluesmen mais aussi Big Mama Thornton.
Je ne savais qu’elle serait vêtue d’une chemise avec une cravate,
coiffée d’un chapeau d’homme avec des chaussures d’homme mais une
jupe. Je me rappelle avoir fait plusieurs ville avec ce festival
et je me disais que je n’aurais peut-être pas la chance d’y retourner
alors je sortais faire des achats en guise de souvenir et un jour elle
m’a dit, je t’accompagne et elle m’a pris le bras et tous les autres musiciens
autour on fait Ouf… mais, je ne pouvais pas lui refuser. Je me souviens
qu’un soir de tournée je jouais Hound Dog derrière elle et
elle sautait sur la scène et elle a perdu son dentier… elle s’est
penchée et a ramassé son dentier l’a remis en place et a
eu un ‘’standing ovation’’ pour ça….
La plupart des musiciens que j’ai côtoyé
ne faisaient pas de musique pour l’argent, je me rappelle que Muddy Water
avait une maison mais les autres je ne crois pas, ils faisaient de la musique
pour le plaisir et avait beaucoup de plaisir. Ça prenait un
verre de whisky, une jolie femme et un instrument et on était
riche. On ne voyait pas que les Rolling Stone, Eric Clapton ou Santana
faisaient beaucoup d’argent, ni ses endroits extérieurs où
on peut recevoir des centaines de milliers de personnes pour un soir. |
-
Je suis allé à Londres et j’ai
joué avec Rod Stuart et j’ai eu les commentaires des Éric
Clapton et Jeff Beck…. Me disant qu’il ne savait pas qu’une Strath pouvait
jouer du blues.
J’étais content d’entendre Éric
Clapton ou Elvis Presley jouer de la guitare ainsi car, il y avait une
légende qui disait que c’était les noirs qui pouvaient jouer
ainsi, pourtant la guitare est faite pour une personne qui a dix doigts
et que si l’on y met le temps on peut en jouer aussi bien que n’importe
qui.. Un jour un gars m’a dit, tu n’as pas peur de travailler ? De
perdre un doigt à travailler dans un garage ainsi ? Je lui
ai dit : il faut bien que je gagne ma vie car je ne veux pas voler.
Il m’a demandé combien fais-tu ici. Alors je lui dit, je fais
2$/heure, il m'a dit, je te fais un chèque postdaté du montant
total que tu fais dans une année et tu pars en tournée avec
moi. Je lui ai dit je ne veux pas laisser mon emploi, mais j’ai deux
semaines de vacance qui s’en viennent alors je veux bien partir à
ce moment là. Nous avons fait une tournée des festivals,
New York, Toronto (Mariposa), Chicago…
J’ai joué avec Junior Wells, pas beaucoup
de musiciens voulaient jouer avec lui, ça a duré un temps
jusqu’au jour où je lui ai dit que je ne voulais plus jouer de sa
manière, que moi je voulais faire plaisir au public qui venait me
voir. |
--
Muddy Waters
|
-
--
Buddy Guy - Eric Clapton
|
J'ai appris avec Guitar Slim qu’il faut faire
participer le publique, je vais même jusqu'à faire chanter
les gens en me promenant dans la foule avec mon micro, je veux que les
gens fassent parti de ce que je fais.
On m’a déjà dit que mes disques
ne sonnaient pas comme ce que je fais sur le stage, je leur ai répondu
que mes mains étaient liées derrière mon dos.
On me passait des remarques telles que tu sonnes comme BB King ou comme
Muddy Water alors j’essayais de ne pas faire ses sons, je ne laissais pas
le Buddy Guy ‘’loose’’. Je me disais un jour j’irais en Angleterre
et il me diront, joue de la guitare et c’est ce que je ferai et je l’ai
fait avec l’album Damn Right I got the Blues, c’est le plus bel album que
j’ai fait.
Si j’avais à refaire ma vie, je revivrais
de la même manière et je prendrais ma guitare acoustique et
j’essaierais de faire sourire quelqu’un, car vous pouvez aller autour du
monde avec la musique c’est un langage international. J'ai été
en Afrique un endroit où jamais je n’aurais imaginé que les
gens avait une idée de ce que je faisais et les gens criaient, pleurait
et souriait. Dieu nous a tous mis sur la terre pour une raison et
non une saison…
Buddy Guy |
3 Vidéos à voir sur You Tube
Buddy Guy et Eric Clapton -->
Buddy Guy et BB King -->
Buddy Guy et Johnny Lang -->
Traduction: Louise Gosselin
Photos web et sur DVD - My Time After a while
Retour
à la page principale
|